Au premier regard, l’installation se présente comme un décor d’intérieur parfaitement inoffensif: un arrangement d’assiettes colorées, accrochées aux murs d’un appartement.
En s’approchant de l’œuvre, on découvre qu’en lieu et place des motifs conven-tionnels (paysages idylliques, fleurs, reproductions de tableaux), les dites assiettes présentent des images terriblement réelles.
Des images sont réalisées en photographiant l’écran de son téléviseur à l’heure des actualités. Plus précisément pendant la dramatique prise d’otages de Moscou (2002) et durant la guerre d’Irak (2003).
Par le décalage brutal entre la forme (un décor d’intérieur rassurant) et son contenu (des images intolérables de souffrance et de violence), ce travail nous confronte avec quelques-uns des problèmes les plus lancinants de notre société contemporaine: la pérennité des conflits et des actes de violence, bien sûr, mais aussi leur médiatisation intensive et intrusive.
Avec le développement spectaculaire des techniques de communication, les drames les plus effroyables font irruption dans l’intimité de nos foyers, pour ainsi dire en temps réel et avec une telle insistance que nous en arrivons parfois à banaliser l’horreur. L’image du pire finit par se fondre dans notre décor quotidien.
Le titre même de l’œuvre est ambigu: «Feuer-Werk» signifie à la fois le «feu d’artifice» et le «travail par le feu» (par exemple le travail céramique). Tant il est vrai que les images des bombardements nocturnes de Bagdad, à force de passer en boucle, finissaient par perdre leur sens réel pour ne plus évoquer qu’un (sinistre) feu d’artifice.
Roland Blättler, Conservateur du Musée Ariana, Genève
At first sight, the installation appears to be a perfectly inoffensive interior decoration: an arrangement of coloured plates on the walls of an apartment.
On closer inspection, viewers discover that instead of conventional motifs (idyllic landscapes, flowers, reproductions of paintings) these plates show terribly real images.
Images are created by photographing the television screen during news broadcasts, more specifically, during the dramatic taking of hostages in Moscow (2002) and the war in Iraq (2003).
Through the sharp discrepancy between the form (a reassuring interior decor) and its content (intolerable images of suffering and violence), this work brings us face-to-face with some of the most abiding problems of our contemporary society: the continued conflicts and acts of violence, of course, but also their intensive and intrusive media exposure.
With the spectacular development of means of communication, the most horrifying dramas invade the privacy of our homes, as it were, in real time and with such insistency that we sometimes come to trivialise the horror. The image of the worst finishes by blending into our everyday surroundings.
The title of the work itself is ambiguous: «Feuer-Werk» signifies both «fireworks» and «work done with fire» (for example, ceramics). Such is the extent to which the images of the nighttime raids on Baghdad, shown time and time again, end up losing their real significance to evoke merely (sinister) fireworks.
Text by Roland Blättler, Curator of the Ariana Museum, Geneva